Un
problème d’échecs est une énigme utilisant les pièces et les règles des échecs, par exemple en donnant une position d’échecs et en demandant de faire «
Mat en deux coups ». Cet énoncé signifie que les blancs doivent jouer un coup puis mater le
roi noir quelle que soit la réponse des noirs. Le créateur d’un tel problème est appelé
compositeur.
Une définition plus précise
Ce qui constitue exactement un problème d’échecs reste ouvert à débat. Néanmoins les diagrammes publiés régulièrement dans la section
problèmes des revues d’échecs, dans les revues de problèmes spécialisées ou dans les livres consacrés au sujet, tendent à tous avoir certains éléments en commun :
- La position est composée c’est-à-dire qu’elle n’est pas tirée d’une partie réellement jouée mais qu’elle a été créée de toutes pièces dans le but spécifique d’en faire un problème. Le rapport des forces est, par exemple, souvent très déséquilibré. Par contre, la position doit être légale, c’est-à-dire qu’elle doit pouvoir être obtenue en respectant les règles du jeu.
- Il y a un but précis : en général, le mat du roi noir en un nombre de coups imposé.
- Il y a un thème et le problème est esthétique. Le thème du problème est une idée sous-jacente, qui apporte cohérence et beauté au problème.
Les types de problèmes
Les problèmes sont classés en fonction de l'énoncé du problème et du matériel utilisé.
Histoire des types de problèmes
Les premiers problèmes d'échecs étaient des mats directs ou des études qui respectaient les règles officielles du jeu.
Le but d'un problème d'échecs n'étant pas l'affrontement de deux camps au sens de la partie, les compositeurs ont assez vite enrichi le domaine du problèmes d'échecs en créant, d'abord, de nouveaux énoncés de problèmes tout en continuant à respecter les règles officielles du jeu, ce sont les problèmes hétérodoxes; puis ensuite en modifiant les règles proprement dites par l'ajout de pièces ou de conditions féeriques.
Problèmes orthodoxes
Les problèmes orthodoxes respectent toutes les règles du jeu d'échecs :
- Mats directs (notés n# ou #n) - les blancs jouent les premiers et font mat en n coups, quelle que soit la défense des noirs.
- Études (notés + pour une étude de gain, = pour une étude de nulle) - ce sont des positions composées de fin de partie d'échecs.
Problèmes hétérodoxes
Les problèmes hétérodoxes respectent aussi toutes les règles du jeu d'échecs, mais le but poursuivi n'est pas le but habituel.
- Mats aidés (notés hn# ou h#n) - les noirs commencent et font leur possible pour aider les blancs à les mater en n coups (les deux camps collaborent).
- Mats inverses (notés sn# ou s#n) - les blancs jouent et obligent les noirs à les mater en n coups, quels que soient les coups joués par les noirs.
Les problèmes d'analyse rétrograde (voir plus loin) ne sont pas classés dans les problèmes hétérodoxes, même lorsqu'ils respectent les règles du jeu.
Problèmes féeriques
Article détaillé : . Les problèmes féeriques utilisent des règles féeriques ou des
pièces féeriques, on peut donc trouver des mats directs, des études, des mats aidés féeriques, mais il existe aussi un certain nombre de problèmes où le côté féerique est juste limité à l'énoncé du problème :
- Mats réflexes (notés rn# ou r#n) - comme les mats inverses, mais avec une condition supplémentaire : dès qu'un camp a la possibilité de donner échec et mat, il en a l'obligation. Si seuls les noirs ont cette obligation, c'est un mat semi-réflexe (noté alors srn# ou sr#n). Ces problèmes sont féeriques, parce que l'énoncé interdit de jouer certains coups qui sont pourtant parfaitement légaux. (Ils sont cependant fréquemment présentés avec les mats inverses plutôt qu'avec les problèmes féeriques)
- Problèmes de série - celui qui joue dispose d'une série de coups sans réponse de son adversaire. Il existe des mats de série directs (notés sdn# ou sd#n), aidés (notés shn# ou sh#n), inverses (notés ssn# ou ss#n) ou réflexes (notés srn# ou sr#n). Ce genre va à l'encontre de la règle d'alternance des coups du jeu d'échecs.
Problèmes d'analyse rétrograde
Les problèmes d'analyse rétrograde sont des problèmes dans lesquels l'énoncé demande d'expliquer la position obtenue en recherchant certains coups de la partie et/ou de modifier la position pour qu'elle puisse être expliquée et légale. De tels problèmes ont été popularisés par
Raymond Smullyan dans son livre
Sherlock Holmes en échecs; par déformation professionnelle,
Sherlock Holmes est en effet bien meilleur en analyse rétrograde qu'au jeu d'échecs classique.
Ces problèmes peuvent ou non comporter des règles féeriques. Les énoncés sont très variés, par exemple :
- Mat direct ou mat aidé qui semble classique, mais qui nécessite de démontrer que le roque n'est pas possible ou que la prise en passant est possible
- Donner les n derniers coups joués ou la partie justificative complète en n coups (on parle aussi de PCPJ pour Plus Courte Partie Justificative)
- Indiquer quelle pièce a été promue
- Indiquer sur quelles cases ont eu lieu les prises et/ou quelles pièces ont été prises
- Colorier les pièces (qui sont toutes blanches sur le diagramme) pour avoir une position légale
- Indiquer quelle pièce enlever ou quelle pièce ajouter pour avoir une position légale
- Retractor - les deux camps reprennent un certain nombre de coups afin de trouver une position dans laquelle les blancs peuvent mater
Problèmes mathématiques
Les problèmes mathématiques sont des problèmes utilisant les pièces d'échecs dont la solution comporte une démonstration mathématique.
Esthétisme
Il n'y a pas de standard officiel permettant de distinguer un beau problème d'échecs d'un autre, et le jugement dépend de chaque personne. Cette notion évolue aussi avec le temps. Mais voici quelques critères que tout compositeur s'efforce de respecter :
- La position du problème doit être légale, c'est-à-dire qu'il doit exister au moins une partie d'échecs permettant d'atteindre le diagramme à partir de la position initiale standard. Que la partie contienne des erreurs grossières d'un point de vue tactique ou stratégique n'a aucune importance. La position n'a pas été créée dans un but pratique pour les joueurs d'échecs.
- Le premier coup de la solution, la clé, doit être unique. Un problème qui a plusieurs clés est démoli et ne sera pas publié. Certains problèmes font exception, où les multiples solutions, voulues par le compositeur, se complètent d'une façon ou d'une autre. Cela arrive fréquemment pour les mats aidés.
- Idéalement, chaque coup noir est suivi d'un seul coup blanc menant au but, même si ce critère d'unicité n'est pas aussi important que pour la clé. S'il y a plusieurs coups possibles, on parle de dual. Les duals qu'un compositeur évite impérativement sont ceux qui concernent les variantes thématiques.
- Le problème doit contenir un ou plusieurs thèmes. C'est plus important que d'être simplement difficile à résoudre. Enormément de thèmes existent et chacun porte un nom. La répétition d'un thème dans un même problème est très appréciée (voir l'exemple ci-dessous).
- La clé du problème ne doit pas être triviale. Les coups qui donnent échec au roi, les captures, les coups qui restreignent la liberté du roi noir, sont tous de mauvaises clés.
- Toutes les pièces présentes sur l'échiquier doivent participer au problème, soit en participant activement dans la solution, soit en empêchant des démolitions. Les pions et pièces inutiles dans la solution et qui ne servent qu'à la correction du problème sont des défauts mineurs.
- L'économie sous toutes ses formes est aussi une qualité. Il vaut mieux avoir :
- le problème le plus court possible pour montrer le thème ;
- le moins de pièces possible sur l'échiquier ;
- les pièces les moins puissantes, par exemple en remplaçant une dame par une tour si cela suffit.
Exemple
Le problème suivant a été composé par Thomas Taverner et publié en 1889 dans le
Dubuque Chess Journal. C'est un mat direct en deux coups.
La clé du problème est 1.Th1. Elle est difficile à trouver parce qu'elle n'introduit aucune menace. Les noirs sont mis en Zugzwang, une situation où chacun de leur coup est pire que de ne pas jouer du tout (les problémistes parlent plutôt de blocus). Mais les règles du jeu le leur imposent et chacun des coups noirs entraîne un coup blanc matant. Par exemple, si les noirs jouent 1... Fxh7, la case d5 n'est plus contrôlée, et les blancs jouent 2.Cd5#. Ou bien si les noirs jouent 1... Te5, ils bloquent la case de fuite du roi, ce qui permet 2.Dg4#. Si les noirs pouvaient ne pas jouer en réponse à la clé, les blancs ne pourraient pas mater en un coup.
Le thème de ce problème est appelé tuyaux d'orgues ; il se caractérise par la position des tours et des fous noirs. Si chacune de ces quatre pièces avance d'une ou de deux cases, elle intercepte une autre pièce et permet un mat. Par exemple, si les noirs jouent 1... Fe7, la case e3 n'est plus contrôlée, et cela permet 2.e3#. Si les noirs jouent 1... Te7, c'est la case h4 qui n'est plus contrôlée et les blancs matent par 2.Th4#. Le thème de l'interférence mutuelle de deux pièces porte le nom Grimshaw. Les tuyaux d'orgues présentent donc quatre Grimshaw.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Anthologie des problèmes d'échecs, Chess informant, Belgrade, 1997 ISBN 8772970314
- Alain Biénabe, Le Guide des échecs. Traité complet, Collection Bouquins, Robert Laffont, 1993 ISBN 2221059131
- Jean-Pierre Boyer, Problèmes d'échecs en deux coups, Hatier, Paris, 1983
- (de) Werner Speckman, Schachminiaturen mit schwarzer Dame, Kleine Schachbücherei Band 24, Beyer Verlag, 1988
- Jean Bertin, Initiation au problème d'échecs, Stock, 1977 ISBN 2234007186
- Michel et Loïc Le Pivert, Au coeur du problème - Essai, France Europe Editions 2004 ISBN 2848251018
Liens externes